Le futur de l'approvisionnement pétrolier - Introduction (1/5)

Voici une traduction amateur et non autorisée de l’introduction du « futur de l’approvisionnement pétrolier ». Les gras remplacent les italiques de l’article original ou sont de mon fait. Les éléments entre accolades sont des rajouts qui m’ont paru utiles. Retrouvez le sommaire par ici.

Introduction


La fourniture abondante de combustibles liquides naturels et bon marché constitue le fondement de nos économies industrielles et modernes, et actuellement la grande majorité de ces combustibles sont obtenus grâce au pétrole dit « conventionnel ». Le pétrole constitue plus d’un tiers de l’offre mondiale d’énergie primaire et plus de 95 % de la consommation d’énergie des transports — un secteur d’une importance cruciale où il n’y a pas de produits de substitution simples. Notre familiarité avec le pétrole peut nous empêcher de nous rendre compte à quel point c’est un produit remarquable : le pétrole a mis des millions d’années à se former à partir des restes d’organismes marins et autres ; on le trouve seulement dans un nombre limité d’endroits où une association spécifique de conditions géologiques coïncide ; il possède une combinaison inégalée d’une concentration d’énergie par unité de masse et de volume ; et il est à la fois très flexible et facilement transportable. Un litre de diesel contient assez d’énergie pour déplacer un camion de 40 tonnes sur trois kilomètres — une performance qui serait impossible avec une propulsion électrique à batteries. Néanmoins, malgré une forte taxation dans la plupart des pays et des prix mondiaux du pétrole historiquement élevés, un litre de diesel reste moins cher qu’une tasse de café.

Le pétrole est une ressource fossile finie qui diminue rapidement, et la capacité à maintenir et à augmenter l’approvisionnement a été un souci récurrent depuis 50 ans. Pendant la première décennie de ce siècle, un nombre croissant de commentateurs a commencé à pronostiquer un pic à court terme et un déclin ultérieur et terminal de la production mondiale de pétrole conventionnel — le fameux pic pétrolier. Ce processus était prévu d’entrainer une perturbation prolongée et substantielle de l’économie mondiale, alors que les sources alternatives d’énergie auraient été incapables de combler le manque à un coût acceptable dans le délai nécessaire. À l’encontre de ceci, d’autres commentateurs soutenaient que la hausse des prix du pétrole stimulerait la découverte et la récupération assistée {NdT : terme de l’administration française pour désigner l’EOR « enhanced oil recovery » voir chapitre 3} du pétrole conventionnel. Pour appuyer leurs arguments, le premier groupe invoque le plateau de la production de pétrole brut depuis 2005 et la hausse des prix afférente (figure 1), alors que le dernier groupe s’appuie sur la récente et rapide croissance de la production américaine de pétrole de roche compacte. Mais en dépit de ces différences, il y a un consensus croissant sur le fait que l’ère du pétrole bon marché est terminée et que nous entrons dans une nouvelle phase très différente.

Figure 1. prix mensuel moyen du pétrole brut (axe de droite) et offre mondiale de pétrole (axe de gauche). Source : Administration américaine de l’information sur l’énergie. Pour les définitions concernant le pétrole, voir la figure 2 et l’encadré 1. L’offre de pétrole a été lente à répondre au doublement des prix de pétrole brut depuis 2005. C’est en partie à cause de conflits politiques dans des régions stratégiques (en Irak par exemple) et des stratégies d’exportateurs majeurs (comme l’Arabie Saoudite), mais reflète largement le fait que les délais pour les nouveaux projets augmentent (5 — 10 ans) et que la difficulté et le coût (en hausse de 50 % depuis 2005) pour trouver et développer de nouvelles ressources sont aussi croissants.

Le débat contemporain sur le pic pétrolier a ses racines dans des conflits persistants entre les « optimistes » et les « pessimistes » sur le sujet de la ressource que l’on peut retrouver au moins aussi loin qu’à l’époque de Malthus[1]. Ces controverses sont étayées par diverses perspectives venant de chercheurs en sciences naturelles ou de spécialistes en sciences sociales, mais dans le cas du pétrole, elles sont considérablement amplifiées par les difficultés à obtenir des données pertinentes, le manque de fiabilité des données disponibles et l’influence envahissante d’intérêts économiques et politiques puissants. De plus, une estimation complète du challenge posé par l’épuisement des gisements pétroliers doit s’étendre au-delà des évaluations géologiques de la taille des ressources, pour inclure le potentiel des différentes technologies d’extraction, le coût de production des différentes ressources, le fonctionnement des marchés mondiaux de combustible, la géopolitique de la sécurité du pétrole et le potentiel techno-économique des améliorations de l’efficacité et de la substitution des ressources dans de multiples secteurs de consommation. Concrètement, peu d’études peuvent convenablement répondre à cette complexité.

Dans cet article, nous introduisons les données, les concepts, les échelles de temps et les arguments qui sous-tendent ce débat et fournissent une base et un contexte pour les articles qui suivent. L’article est organisé comme suit. La section 2 résume l’origine, la nature et la classification de différents types de ressources pétrolières, alors que le chapitre 3 décrit les mécanismes de la production de pétrole, l’estimation mondiale des réserves et des ressources de pétrole et les tendances des découvertes et de la production pétrolière.
La section 4 étudie des profils classiques de production des gisements, de bassins et de régions de production en montrant comment cela étaye les inquiétudes sur l’approvisionnement futur. La section 5 résume les arguments en faveur ou contre la réalité d’un prochain pic de la production mondiale de pétrole et évalue rapidement certaines options d’atténuation. Enfin, le chapitre 6 introduit les articles de ce numéro spécial {NdT : partie non traduite}.


Références


1 Malthus  T. 1798 An essay on the principle of population as it affects the future improvement of society with the remarks on the speculations of Mr Godwin, Mr Condorcet and other writers. London, UK: Reeves and Turner.

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