Notre futur de chasseurs-cueilleurs : changement climatique, agriculture et dé-civilisation

Notre futur de chasseurs-cueilleurs : changement climatique, agriculture et dé-civilisation, John Gowdy, traduction Le Partage, 3 déc 2019

John Gowdy est professeur émerite d'économie et d'études scientifiques et technologiques au Rensselaer Polytechnic Institute à Troy, New York. Il a reçu le prix Herman Daly pour ses contributions à l'économie écologique.

« Tout au long de ma carrière, je me suis intéressé à la relation entre les systèmes économiques, les institutions sociales et le monde naturel. Mes recherches actuelles, en collaboration avec des biologistes évolutionnistes, se concentrent sur l'évolution des systèmes économiques. Je me sens chanceux d'être économiste en cette période de changement rapide dans le domaine. Après plusieurs décennies de stagnation intellectuelle, l'économie s'ouvre à de nouvelles idées issues des sciences du comportement, de la biologie et de la théorie des systèmes. Ce réveil est porteur de la promesse de rendre l'économie à nouveau pertinente face aux défis redoutables auxquels notre espèce est confrontée. »

Points clés

  • Le climat stable de l’holocène a rendu possible l’agriculture et la civilisation. Auparavant, le climat instable du pléistocène ne le permettait pas.
  • Les sociétés humaines après [l’avènement de] l'agriculture se sont caractérisées par des dépassements [surexploitations] et des effondrements. Le changement climatique a souvent conduit à ces effondrements.
  • Les estimations de type « business-as-usual » [statu-quo] stipulent que le climat se réchauffera de 3 à 4 °C d’ici 2100 et de 8 à 10°C par la suite.
  • Les futurs changements climatiques ramèneront la planète Terre aux conditions climatiques instables du Pléistocène, et l’agriculture redeviendra impossible.
  • La société humaine sera à nouveau caractérisée par la chasse et la cueillette.

Résumé

Pendant la majeure partie de l’histoire de l’humanité, soit environ 300 000 ans, nous avons vécu en chasseurs-cueilleurs au sein de communautés durables et égalitaires de quelques dizaines de personnes. La vie humaine sur Terre, et notre place au sein des systèmes biophysiques de la planète, ont changé de façon spectaculaire avec l’Holocène, l’époque géologique ayant débuté il y a environ 12 000 ans : Une combinaison sans précédent de stabilité climatique et de températures chaudes a rendu possible une plus grande dépendance aux céréales sauvages dans plusieurs régions du monde.

La militarisation de l’empire occidental : comment la pandémie de COVID a accéléré le processus

La militarisation de l’empire occidental : comment la pandémie de COVID a accéléré le processus, Ugo Bardi, chercheur et professeur de chimie à l’Université de Florence, 18 oct 2020 (traduction via DeepL)

L’histoire se répète — oh, oui ! Et parfois, elle se répète si vite et si impitoyablement qu’elle vous laisse à bout de souffle. Pensez à ce qui se passe en ce moment : le COVID ; les confinements, les masques, les limitations de mouvements : tout cela s’est passé en quelques mois, et le monde de l’année dernière semble si lointain qu’il pourrait être considéré comme faisant partie du Moyen-Âge toujours en cours.

Et pourtant, il y a une certaine logique dans ce qui s’est passé. L’histoire peut vous surprendre, et c’est généralement le cas (la seule chose sûre que nous apprenons de l’histoire est que les gens n’apprennent jamais de l’histoire). Mais quoi qu’il arrive dans l’histoire, il y a une raison pour que cela se produise. Et ce que nous voyons n’est pas inattendu. Nous l’avons déjà vu, c’est clair et inévitable : il s’agit de la tendance à la militarisation d’une société en déclin.

James C. Scott, Homo Domesticus - Une Histoire profonde des premiers États - recensions

La préhistoire de l'État, Nonfiction.fr, 16 avril 2018

« Le livre de James C. Scott propose simultanément une synthèse de la recherche la plus récente sur les débuts de l’histoire de l’humanité et un regard critique sur la naissance des États. Il se donne pour objectif de remettre en cause certaines idées reçues sur la sédentarité, la domestication des animaux et le développement de l’agriculture, dans le lien que ces phénomènes entretiennent, d'après les conceptions communément admises, avec l’émergence des structures étatiques.

Transition énergétique - Revue de web, sept/oct 2020

Sur la vitesse des transitions énergétiques :

« Vaclav [Smil] a décrit les énergies renouvelables comme la quatrième grande transition énergétique (après la maîtrise du feu, le passage de la cueillette à l’agriculture et à la domestication, le passage de la biomasse et du travail physique vivant à la combustion de combustibles fossiles. Néanmoins, il a également souligné les décennies nécessaires au déploiement des transitions énergétiques passées. (…) Il a également mis en garde contre l’adoption de solutions énergétiques à la mode, qui semblent excellentes sur le papier, mais qui sont difficiles à mettre à l’échelle, et a souligné que les gains d’efficacité énergétique sont souvent compensés par une plus grande consommation. »  Michael Cembalest J.P. Morgan

« L'histoire montre cependant que les transitions énergétiques ne se font pas rapidement. Le moment clé de la première grande transition - du bois au charbon - fut janvier 1709, lorsqu'un métallurgiste anglais du nom d'Abraham Darby compris comment utiliser le charbon afin, dit-il, “d'obtenir un moyen plus efficace pour produire du fer”. Mais il fallut deux siècles avant que le charbon ne supplante le bois comme premier combustible. Le pétrole a été découvert dans l'ouest de la Pennsylvanie en 1859, mais ce n'est qu'un siècle plus tard, dans les années 1960, que le pétrole remplaça le charbon comme première ressource énergétique mondiale. » Daniel Yergin


    Revue de web sept - oct 2020

      Ecologie définition, Patrick Juignet, 13 septembre 2020

      « Ernest Haeckel a créé le mot, en 1866, par l'association du grec οἶκος / oîkos (habitat) et λόγος / lógos (« discours »). Il voulait ainsi désigner une nouvelle science de l'habitat au sens du milieu naturel. Dans son ouvrage Morphologie générale des organismes, il désignait par ce terme « la science des relations des organismes avec le monde environnant, c'est-à-dire, dans un sens large, la science des conditions d'existence ».

      On dira aujourd'hui que l’écologie est l’étude scientifique des interactions et échanges dans l'environnement terrestre en rapport avec les êtres vivants. Cette connaissance pense principalement en termes d'ensembles, d'organisations et de systèmes, car dans l'environnement terrestre rien n'est complètement isolé, tout interagit. L'ensemble des êtres vivants, de leur milieu de vie et les relations qu'ils entretiennent forme un écosystème. L'écologie étudie les écosystèmes. » Lire

      Une dynamique qui aboutit nécessairement à une crise sociale et politique, Patrick Artus, chef économiste de la banque Natixis, 14 septembre 2020

      Crise sociale et politique ou conflits armés et guerres civiles ?

      « Dans les pays de |‘OCDE, la richesse augmente tendanciellement plus vite que la masse salariale. Ceci veut dire que la situation financière des détenteurs de la richesse s’améliore continuellement par rapport à celle des salariés.

      On voit aussi aujourd’hui après la crise de la Covid la présence simultanée d’un côté du freinage des salaires et de la hausse du chômage, d'autre part de la poursuite de la hausse des prix de l’immobilier et d’une forte hausse des cours boursiers.

      Cette situation, qui résulte en particulier des politiques monétaires expansionnistes et de la déformation du partage des revenus au détriment des salariés, ne peut pas étre indéfiniment acceptée socialement et politiquement.

      Il faut donc attendre dans le futur soit un partage des revenus plus efficace associé à une politique monétaire plus restrictive, soit une taxation beaucoup plus forte de la richesse. (…)

      Divergence entre la richesse et les salaires

      Nous regardons l'ensemble des pays de l‘OCDE. Le graphique 1 compare l’évolution d‘une part de la masse salariale, d’autre part de la richesse (somme de la monnaie, de la valeur de marché des obligations, de la valeur des actions et du patrimoine immobilier). (…)

      On voit la croissance beaucoup plus rapide de la richesse que des salaires : la situation financière des détenteurs des patrimoines s’améliore continûment par rapport à celle des salariés.

      Cette situation est aggravée par la crise de la Covid. On voit dans la période récente le freinage des salaires, la hausse du chômage, alors que les prix de l’immobilier continuent d‘augmenter et que les indices boursiers se sont fortement redressés. (…)

      D’où vient la divergence entre richesse et salaires ?

      La divergence entre richesse et salaires a deux causes essentielles :

      • la déformation du partage des revenus au détriment des salariés, qui implique que les salaires progressent moins vite que le PIB, et aussi soutient la profitabilité des entreprises ce qui fait monter les cours boursiers. Après les crises, les entreprises parviennent a rétablir très vite leur profitabilité par une nouvelle déformation du partage des revenus en leur faveur ;
      • la politique monétaire très expansionniste, avec des taux d’intérêt faibles par rapport à la croissance et la forte progression de la liquidité, ce qui pousse a la hausse les prix des actifs. (…)
      Synthèse : quelles perspectives ?

      Nous pensons que cette situation où, avec la déformation du partage des revenus au détriment des salariés et les politiques monétaires trés expansionnistes, il y a divergence entre la richesse et les salaires n’est pas durablement acceptable socialement et politiquement. Les opinions rejetteront une situation où les salaires augmentent lentement tandis que la richesse progresse rapidement. Ceci implique qu’il faut attendre dans le futur :

      • un partage des revenus plus favorable aux salariés, ce qui veut dire aussi une inflation plus forte;
      • une politique monétaire plus restrictive, visant à stabiliser les prix des actifs, d’où en particulier un redressement des taux d’intérêt à long terme;
      • ou bien, si ce n‘est pas possible, si le partage des revenus reste défavorable aux salariés, en raison du pouvoir de négociation élevé des entreprises, si la politique monétaire reste très expansionniste, pour éviter une crise des dettes, donc si les prix des actifs et la richesse continuent à progresser très rapidement, une taxation plus forte de la richesse. » Lire et visualiser les graphiques

      Tout cela finira mal, un jour ou l’autre il faudra qu’il y ait la guerre, plus rien n’arrête les fous, Bruno Bertez, 14 sept 2020

      « Artus qui est plutôt bon pour un économiste rémunéré par les banques se rallie à une idée que je développe incessamment depuis des décennies:

      La crise de la profitabilité du capital par excès de capital inefficace et fictif oblige à surexploiter les salariés et à les paupériser. Cela pèse sur la demande et produit de la surproduction et de la déflation. Cela produit du populisme; et fracasse nos arrangements politiques. Finalement cela ne saurait durer on arrivera à une impasse.

      En revanche, là ou je diverge c’est sur la nature de la crise; je crois que les peuples et le salariat sont anesthésiés, il n’y a plus d’opposition efficace, et je suis persuadé que la crise ne sera ni politique ni sociale mais bien plus vaste et en particulier elle sera géopolitique du type guerre avec des composantes guerres civiles.

      Le combat social avait une fonction systémique régulatrice, il servait de garde fou au capital et aux élites. la mort du combat social a fait disparaitre le garde fou. » Lire

      Nicolas Hulot et Frédéric Lenoir: « Il faut absolument sortir de cette logique absurde de croissance infinie dans un monde fini », Virginie Larousse, Le Monde, 4 octobre 2020

      « Dans un entretien au « Monde », l’ex-ministre de la transition écologique et le philosophe invitent la société à « s’interroger en permanence sur la finalité de ses choix ». Cette « révolution des consciences » est, alertent-ils, une « question de survie ».

      Frédéric Lenoir: Je partage avec Nicolas Hulot et beaucoup d’autres un certain nombre de valeurs: l’aspiration à la beauté, le lien avec la nature, la liberté – une liberté avant tout intérieure, qui ne consiste pas simplement à suivre ses désirs, mais à accepter de se fixer des limites – (…)

      Ce qui nous conduit dans le mur, c’est la conjugaison des égoïsmes, le fait que nous en voulons toujours plus. Comment comprendre cette incapacité à se satisfaire de l’existant?

      F L.: Des philosophes grecs au Bouddha, les sages de l’humanité ont pointé ce caractère paradoxal de l’être humain, animé par une pulsion le poussant à toujours posséder davantage, mais qui a également cette capacité extraordinaire de prendre conscience qu’il doit se modérer pour découvrir un bonheur plus profond et durable que l’euphorie du «toujours plus». Des explications scientifiques corroborent cette intuition: notre cerveau a besoin de la dopamine, addictive, qui lui apporte du plaisir immédiat. On réalise pourtant que ce qui fonde nos joies les plus profondes vient de l’être – la connaissance, la contemplation de la nature, la qualité des relations qu’on entretient – et non de l’avoir.

      N.H.: Victor Hugo avait bien anticipé le vice: «A force de vouloir posséder, c’est nous qui sommes possédés.» Cela dit, n’oublions pas que beaucoup de gens qui n’ont pas le minimum aimeraient en être à ce stade. Mais nous sommes nombreux à avoir cédé à une forme d’ébriété, la société ayant créé cette tyrannie du désir qui nous rend insatisfaits en permanence. Nous devrions commencer par prendre conscience que nous aspirons à être des êtres libres, alors qu’en réalité nous sommes conditionnés, quasiment automatisés. Nous ne savons plus limiter nos pulsions. Cette simple conscience devrait suffire à nous interroger. Si nous voulons réellement être libres, reprenons la main sur nos pulsions.

      Un grand malentendu existe avec le mot «liberté», qui en réalité ne désigne pas l’absence de règles, mais au contraire la règle qu’on se fixe à soi-même. Cela fait partie des étapes de civilisation que l’humanité doit franchir – savoir se fixer des limites –, ce qui est sans doute la phase la plus difficile. (…)

      F.L.: Dès le XVIIe siècle, Spinoza, l’inventeur de la philosophie politique moderne, a théorisé nos démocraties modernes, expliquant que le meilleur système est celui qui sépare le politique et le religieux, avec un État de droit qui garantisse la liberté de conscience et d’expression. Mais il dit en même temps que jouir de ces libertés politiques est vain si nous restons esclaves de nos désirs et de nos pulsions.Il faut donc développer une capacité à discerner ce qui provoque en nous des joies profondes qui nous élèvent, et non de petits désirs qui nous diminuent. L’essence de l’homme, c’est le désir, rappelle-t-il. Il ne s’agit pas de le supprimer mais de l’orienter par la raison vers ce qui nous fait grandir et est socialement juste. C’est pourquoi je pense, à sa suite, qu’il faut toujours lier l’éthique et le politique. (…)

      La spiritualité n’est pas l’apanage des religions. Quoi qu’il en soit, tout ce qui nous permet de nous relier, d’honorer la vie et de nous rendre compte de ce privilège incroyable que nous avons d’être en vie, d’éveiller les consciences à cette dimension miraculeuse, voire magique, de la vie, doit être favorisé. Car contrairement à ce que l’on croit, cette dernière n’est pas la norme dans l’univers, mais l’exception.

      Qu’est-ce que le sacré, selon vous, et comment en retrouver la saveur dans une société qui n’est plus connectée à une forme de transcendance?

      F.L.: Il y a deux définitions du sacré. L’une, élaborée par le fondateur de la sociologie, Émile Durckheim, distingue le sacré du profane: est sacré ce que les religions ont sacralisé comme lieux, espaces et temps pour les séparer du monde profane. L’autre définition du sacré, plus anthropologique,est celle de Rudolf Otto: le sacré est ce que l’être humain peut éprouver quand il se trouve dans la nature et qu’il se sent dépassé par ce spectacle qui l’élève, le bouleverse, l’émeut, et parfois le terrorise. Je crois que nous avons tous expérimenté ce sentiment à un moment ou un autre, cet émerveillement devant l’harmonie de la nature ou l’ordre cosmique. Or beaucoup de gens vivent en ville et se sont coupés d’un tel spectacle. Il est urgent de redécouvrir ce sens profond et universel du sacré qui fait quel’on se sent appartenir à un Tout, un Tout harmonieux et qui nous dépasse. Ce faisant, on peut éprouver des joies très puissantes, se sentir ancré à la Terre et relié au cosmos. Alors que lorsqu’on est délié de la nature, on flotte comme un brin de paille, on reste cantonné dans le mental, les idées. » Lire

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