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Une enquête ahurissante du New York Times révèle la collusion des grandes banques sur les marchés financiers les plus lucratifs, ceux des produits dérivés. Avant de lire les articles, voici quelques explications sur les produits dérivés, les dark pools et les chambres de compensation.
Produits dérivés
A l'origine, les produits dérivés sont conçus pour être des assurances, pour se protéger d'un risque, de la variation (en ma défaveur) d'un prix. Il existe ainsi des produits dérivés sur les matières premières, les monnaies (taux de change), les taux d'intérêt, les obligations, les actions, les prêts et surement bien d'autres encore... En 2010, la valeur des produits dérivés est d'environ 600 mille milliards de dollars (douze zéro !), ils sont la poule aux œufs d'or des institutions financières.
Prenons l'exemple de la dette. États et entreprises ont besoin d'argent, ils peuvent par exemple vendre des titres de dette, ce sont les obligations. Les investisseurs prennent un risque en achetant cette dette, sera t-elle rembourser ? Alors ils s'assurent. Ils achètent une assurance pour se protéger d'un défaut de remboursement éventuel. Ce sont les fameux cds, credit default swaps. Ces produits comme les obligations peuvent être échangé, ils perdent ou prennent de la valeur monétaire en fonction des aléas du marché. Quand vous achetez un cds vous n'êtes pas obligés d'acheter l'obligation correspondante ! C'est donc, comme si vous achetiez une assurance incendie sur la maison de votre voisin, vous n'avez alors qu'une seule envie : que sa maison brule ! C'est exactement ce qui est arrivé à la Grèce. Ce fut orchestré par le meilleur insider possible celui qui lui avait appris à trafiquer ses comptes quelques années auparavant, la banque Goldman Sachs. La finance fait mieux encore. Il existe en effet des produits qui sont des assurances sur l'assurance, en fait il existe même des assurances au cube, assurance d'assurance d'assurance!!!
Dark pools
Le marché des actions est quasiment transparent (de moins en moins en fait) : les participants connaissent les volumes et les prix des offres et des demandes. La grande majorité des produits dérivés sont échangés au sein des dark pools. Au contraire des marchés actions elles sont opaques, les clients des banques (les banques vendent et achètent pour eux) ne savent rien des volumes de transactions et des prix réels. Si un acteur important du marché prend trop de risques les intervenants ne sont pas au courant non plus. L'essentiel de ces transactions se fait dans le secret sans aucune régulation extérieure. Ici, je vous renvoie au billet sur Goldman Sachs et les dark pools.
Chambres de compensation
La crise financière étant passée par là, le législateur américain a tenté de mettre un peu d'ordre et de transparence pour diminuer la taille des ces dark pools en obligeant les acteurs à passer par des chambres de compensation. Ce sont des intermédiaires qui assurent la pérennité du marché. Les vendeurs y déposent leur titres, les acheteurs y déposent des cautions jusqu'à ce que la transaction soit terminée (plusieurs mois d'échéance parfois). Quand vous participez à une vente aux enchères d'un bien immobilier vous devez déposez une caution avant le début de la vente. Une chambre de compensation c'est un peu le même fonctionnement, disons très grossièrement qu'il s'agit d'éviter le risque d'un chèque sans provision. Mais il y a conflit d'intérêt au sein de ces organismes: les banques elles-mêmes sont le comité de surveillance (régulateur, haute autorité, gendarme) des chambres de compensation. Les neuf banques les plus importantes sur le marché des dérivés décident pendant leurs réunions, à huis clos, si un produit dérivé va rester dans une dark pool ou doit passer par une chambre de compensation. C'est comme si votre garagiste effectuait et signait le contrôle technique de votre voiture !
Lisez les articles vous en apprendrez bien plus, dingue !
L'HISTOIRE ÉDIFIANTE du New York Times par François Leclerc | 13/12/2010
« Tous les mois, le mercredi, neuf membres d’une société de l’élite de Wall Street se rencontrent dans Midtown Manhattan [le quartier des affaires de New York]. Ils partagent un même objectif : protéger les intérêts des grandes banques qui agissent sur le vaste marché des produits dérivés, l’un des plus profitables – et controversé – de la finance. Ils ont aussi en commun des secrets, le compte-rendu de leurs réunions de même que leurs identités, strictement confidentiels ».[...]Ce n’est évidemment pas par hasard, car ces comités du risque des chambres de compensation qui ont poussé comme des champignons ont été investis par la loi Dodd-Frank de régulation financière de très importants pouvoirs. Notamment ceux de décider quels sont les produits dérivés qui n’ont pas à utiliser les services des chambres de compensation – et restent ainsi totalement négociés de gré à gré – au prétexte qu’ils ne sont pas standardisés et ne peuvent donc être compensés. Ainsi que de déterminer le coût du service, qui s’ajoute aux commissions des banques, et les montants financiers qui doivent être apportés en couverture. Les mégabanques sont donc totalement juges et parties.[...]« Pas un seul domaine financier n’est probablement aussi profitable aujourd’hui que les produits dérivés », explique Louise Story. « Plus que l’activité de prêt, celle des cartes de crédit, des fusions et acquisitions ou de la gestion de fortune. » poursuit-elle, pour conclure : « Le secret qui entoure le marché des produits dérivés est un facteur clé des importants profits réalisés par les banques ». Les moyens dont elles disposent et qu’elles mobilisent pour le protéger sont à l’avenant.[...]
Au fil de son enquête, Louise Story raconte comment les mégabanques firent par la suite obstacle aux velléités d’autres intervenants d’entrer sur le marché des chambres de compensation, avec également comme souci d’empêcher l’avènement d’une quelconque cotation électronique des produits dérivés, qui apporterait de la transparence et risquait de court-cicuiter les banques.[...]
Une infographie pour comprendre les chambres de compensation :
Retrouvez le billet complet sur captainshortman
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