Réformer ou détruire le capitalisme, Michel Aglietta

Transcription de l'intervention de Michel Aglietta lors de la conférence-débat « Réformer ou détruire le capitalisme », aux Jeco 2019

M. Aglietta[1] est professeur émérite de science économique de l'université Paris-Nanterre, conseiller scientifique au CEPII, spécialiste d'économie monétaire, à l'origine de l'école de la régulation.


On vit dans l’incertitude, caractéristique essentielle des époques de rupture. Si l'on veut en comprendre l’impact social, il faut saisir deux dimensions fondamentales du problème qui relie le capitalisme aux sociétés :
  1. Le capitalisme n’est pas intrinsèquement lié à la démocratie.
  2. Le néolibéralisme qui s’est imposé dans les quarante dernières années a établi une financiarisation de l’économie qui a détruit l’ordre social des trente années post-deuxième guerre mondiale — époque qu’on a appelée le Fordisme.
Trois points traités :
  1. Les rapports entre capitalisme et démocratie sont paradoxaux.
  2. Le néolibéralisme a entraîné la dégradation de la démocratie par la recherche de la rente.
  3. Nous avons besoin d’un nouveau contrat social pour une croissance inclusive et soutenable. Nous avons besoin d’une définition rigoureuse de ce qu’est une croissance inclusive et soutenable.

Le pétrole : 215 milliards d'esclaves par jour

L'énergie contenu dans un baril de pétrole (159 litres) correspond au travail physique d'un être humain pendant 8,6 années (40 heures/semaine). (Alice Friedemann)

Le monde a consommé 100 millions de barils de pétrole et autres liquides fossiles chaque jour de l'année 2018. (EIA)

C'est comme si l'espèce humaine avait 215 milliards d'esclaves à son service, chaque jour.

Il faudrait "s'amuser" à faire le calcul pour  le charbon et le gaz naturel...

50 semaines * 40 heures * 8.6 années  = 17 200 heures
17 200 h / 8 h   = 2 150 personnes pour un baril

Jancovici : l'UE et le principe des vases communiquants

 ou les inconvénients de la libre circulation des capitaux et des individus

"Lors d'une conférence à la Société Française de Physique (SFP), Jean-Marc Jancovici explique qu'il est tout à fait normal que les Français s'appauvrissent dans l'Union Européenne. Il le démontre en utilisant une analogie physique sur la différence de potentiel." source
Jancovici : "Si vous voulez vraiment l’Europe, il faut accepter de donner la moitié de vos revenus aux Roumains.

    Une nation multiple et divisée [revue de web]

    maj le 5 janv. 2020

    L'archipel français naissance d'une nation multiple et divisée de Jérôme Fourquet, édition du Seuil, 7 Mars 2019.

    Présentation de l'éditeur :

    "L'auteur souligne la fragmentation sociale actuelle de la France, montrant combien s'est affaibli le socle commun des références et des valeurs dans le pays. Entre sécession des élites, autonomisation des catégories populaires, instauration d'une société multiculturelle, un bouleversement anthropologique est à l’œuvre."

    "En quelques décennies, tout a changé. La France, à l'heure des gilets jaunes, n'a plus rien à voir avec cette nation une et indivisible structurée par un référentiel culturel commun. Et lorsque l'analyste s'essaie à rendre compte de la dynamique de cette métamorphose, c'est un archipel d'îles s'ignorant les unes les autres qui se dessine sous les yeux fascinés du lecteur.
    C'est que le socle de la France d'autrefois, sa matrice catho-républicaine, s'est complètement disloqué. Jérôme Fourquet envisage d'abord les conséquences anthropologiques et culturelles de cette érosion, et il remarque notamment combien notre relation au corps a changé (le développement de pratiques comme le tatouage et l'incinération en témoigne) ainsi que notre rapport à l'animalité (le veganisme en donne la mesure). Mais, plus spectaculaire encore, l'effacement progressif de l'ancienne France sous la pression de la France nouvelle induit un effet d'« archipelisation » de la société tout entière : sécession des élites, autonomisation des catégories populaires, formation d'un réduit catholique, instauration d'une société multiculturelle de fait, dislocation des références culturelles communes (comme l'illustre, par exemple, la spectaculaire diversification des prénoms).

    À la lumière de ce bouleversement sans précédent, on comprend mieux la crise que traverse notre système politique : dans ce contexte de fragmentation, l'agrégation des intérêts particuliers au sein de coalitions larges est tout simplement devenue impossible. En témoignent, bien sûr, l'élection présidentielle de 2017 et les suites que l'on sait...

    Avec de nombreuses cartes, tableaux et graphiques originaux réalisés par Sylvain Manternach, géographe et cartographe."
    L'auteur, Jérôme Fourquet, né le 8 février 1973 au Mans, est un politologue français. Il est directeur du département « opinion et stratégies d’entreprise » de l'institut de sondages IFOP depuis 2011. Ses travaux portent notamment sur le Front national et, plus largement, sur les comportements et attitudes politiques en lien avec les religions, l’immigration ou les questions d’identité. Il est également expert en géographie électorale.

    Gaël Giraud: Les marchés financiers face au changement climatique [entretien vidéo]

    Voilà ce que déclare Jean-Claude Werrebrouck, professeur retraité de sciences économiques spécialiste  du développement, de l’économie pétrolière et de management public à propos de l'entretien que je vous propose :
    « Une vidéo brillantissime pour comprendre l'essentiel. Nous invitons à réfléchir sur l'interview de Gaël Giraud, chef économiste à l'Agence française de développement. Nous avons là en 90 minutes l'essentiel de ce qu'il faut comprendre pour l'avenir de l'humanité. »
    Gaël Giraud explique ce que pensent, ce que font ou pas et ce que devraient faire, selon lui, les marchés financiers pour lutter contre le changement climatique. Gaël Giraud est merveilleusement didactique et synthétique. Malgré tout, le profane devra mettre en pause la vidéo, réécouter des passages pour intégrer un minimum d'éléments sur le fonctionnement des marchés financiers.

    A l'origine, la finance est le métier qui consiste à évaluer les risques liés aux opérations économiques, à l'activité d'entreprendre. Ce sont des paris sur le futur, incertains par définition, d'où le terme spéculation: "je suppose que, j'imagine que, je fais le pari de...". C'est un métier nécessaire au développement des sociétés humaines.


    Ce que propose GG est sûrement ce qu'il faudrait faire, en tout cas c'est le moins pire de "ce qui est proposé par le système". Cependant, un fait n'est pas assez explicité tout au long de l'interview bien que GG en soit parfaitement conscient, ses travaux le prouvent. Des investissements dits verts et des politiques climatiques volontaristes, s'ils permettraient d'adoucir la pente de la courbe des émissions de gaz à effet de serre ne garantissent en rien le fait que les émissions diminuent. Les faire baisser est une question de physique: il faut diminuer l'activité économique, rentrer en décroissance, s'appauvrir (en terme monétaire s'entend), inverser le développement économique des sociétés humaines.

    Je  doute que les sociétés humaines s'engagent sur cette voie... Par ailleurs, dans ce nexus, l'amélioration de l'efficacité énergétique est utile mais pas suffisante et la question démographique se pose également...


    Emma - La réforme des retraites en BD

    Emma, ingénieure informaticienne le jour, dessinatrice la nuit, nous as pondu il y a déjà trois mois, une BD de 32 pages pour nous éclairer sur la réforme des retraites. Je vous laisse apprécier.

    Je retiens (entre autre car il y a bien d'autres soucis) :
    • que la hausse de la productivité n’est pas prise en compte,
    • que 50 % des personnes de 60 ans n’ont pas de travail (nous savons tous qu’après 50 ans, dans notre pays, il est difficile de trouver un emploi si on est au chômage)
    • et que l’espérance de vie en bonne santé stagne à 65 ans pour les femmes et 63 ans pour les hommes.

    C'est quoi les marchés financiers? En 10 minutes.

    Présentation des marchés financiers, leur fonctionnement, les risques et la probabilité d’une crise financière, en 10 minutes.

    Gilles Sanfilippo, Enseignant-chercheur en finance

    Source : Crise financière : à quand la prochaine ?, Café Sciences et Citoyens de l'agglomération de Grenoble, 5 Nov 2019


    Quelques notes augmentées sur l'extrait :

    • Les marchés au comptant : le règlement des produits financiers s’effectue immédiatement à l’échange. À l’origine, les actions et les obligations servent à financer les activités économiques, les actions sont des parts de propriété d’entreprise, les obligations sont un équivalent de prêt bancaire que tout intervenant sur les marchés peut acquérir.
    • Les marchés de produits dérivés : le paiement des instruments financiers se fait à une date ultérieure, l’objectif premier est de protéger les intervenants d’un risque futur (un peu comme une assurance), les instruments de ces marchés sont liés à d’autres actifs dits actifs sous-jacents (blé, pétrole, actions, etc.).
    • Le marché actions, c’est à peu près 80 mille milliards de dollars de capitalisation (80 000 000 000 000).
    • La taille du marché obligataire est d’environ 100 mille milliards de dollars.
    • Les marchés des dérivés sont estimés à 1,2 million de milliards de dollars (1 200 000 000 000 000).
    • Les marchés de dérivés peuvent être soit réglementés — les titres sont côtés publiquement — soit de gré à gré (OTC, over the counter) dans ce cas l’évaluation des titres est laissée à l’appréciation des acteurs qui passent contrat.
    • Comment est valorisée une action ?
      On établit des prévisions sur les résultats futurs d’une entreprise que l’on compare à la rentabilité (le taux) que l’on souhaite exiger en fonction du risque estimé de cette entreprise. Plus l’écart entre des prévisions optimistes sur les résultats futurs et un taux exigé faible, est grand ; plus le prix de l’action de l’entreprise en question va augmenter.
      Aujourd’hui, globalement, les entreprises ont des résultats d’exercice positifs (elles font des bénéfices) et elles se financent (prêts bancaires, obligations) à des taux d’intérêt très faibles. Donc, la rentabilité que les intervenants exigent d’elles est, elle aussi, faible et par conséquence les prix des actions sont au plus haut.
    • Aujourd’hui, il y a de moins en moins d’entreprises qui cherchent à se financer sur le marché boursier. A contrario, le financement privé (private equity) explose : en trois ans, il a été multiplié par trois. C'est l'évolution que surveille G. Sanfilippo et qui le questionne…
    Source: Visual Capitalist via Liliane Held-Khawam






    Scénarios énergie-climat : une prospective irréaliste ?

    Les limites des scénarios publics type « scénarios 2°C »

    (...) Ces scénarios reposent le plus souvent sur des modèles d’évaluation intégrés qui n’ont pas été conçus pour décrire et accompagner des ruptures économiques et sociétales profondes. Ils laissent en outre apparaître des limites méthodologiques importantes. Ces limites ont trait à des hypothèses fortes qui, le plus souvent, ne sont guère explicitées ni consolidées. Parmi ces hypothèses hardies figurent notamment :
    • une rupture de l’intensité énergétique du PIB sans précédent dans l’histoire économique ;
    • le postulat d’une croissance économique future stable, sans impact négatif de la hausse des prix du carbone ou de contraintes sur l’accès aux énergies fossiles, par exemple ;
    • un développement colossal d’activités de capture-stockage du CO2 pour l’heure embryonnaires.
    Les scénarios climatiques publics « 2°C » font en moyenne l’hypothèse d’un gain d’efficacité énergétique du PIB de l’ordre de 3 % par an sur la période 2020-2040. Une telle tendance n’a jamais été observée, y compris lors des chocs pétroliers. Elle revient dans certains cas à faire l’hypothèse d’une activité économique qui croît sans besoin croissant d’énergie : certes souhaitable, cette rupture fondamentale est insuffisamment explicitée. Le dernier rapport annuel de l’AIE (Agence internationale de l’énergie) fait état d’un gain d’efficacité énergétique de seulement 1,2 %.

    Les scénarios présentés comme compatibles avec des trajectoires de réchauffement global de 2°C ou 1,5°C qui ont été analysés par le Shift Project sont ceux de l’Agence internationale de l’énergie, de Greenpeace, de l’IRENA, de plusieurs grandes compagnies pétrolières et ceux utilisés par le GIEC.

    Une illustration du lien Énergie-PIB dans les scénarios étudiés. Source : Banque mondiale (PIB), BP stat 2018 (énergie primaire), documentation des producteurs de scénarios.  
    Les scénarios analysés tablent sur une amélioration de l’efficacité énergétique sans précédent historique. Une hypothèse forte, faiblement étayée dans la plupart des scénarios étudiés. En bleu, les valeurs historiques (de 1950 à 2017). En rouge une projection avec une amélioration de l’efficacité énergétique de 1,5 % par an (le mieux qu’on ait su faire depuis 30 ans). En vert la « moyenne » des scénarios analysés. En gris les différents scénarios analysés.
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