La pandémie de la Covid-19 et le réchauffement climatique ont des causes communes que l’on peut rassembler sous l’expression « l’exploitation de la terre par les sociétés humaines ». La déforestation qui est le deuxième facteur du réchauffement climatique met en contact des espèces sauvages avec les animaux domestiques et l’homme. L’augmentation des températures fait se déplacer les espèces animales vers des zones à plus fortes densités démographiques. Ces deux facteurs donnent aux virus séjournant chez les animaux sauvages plus de probabilité de trouver des hôtes humains.
L’épilogue de « Contagion » (2011) (bande-annonce), film inspiré par l’infection à virus Nipah, montre le lien entre l’exploitation des écosystèmes par les sociétés humaines et la survenue d’une épidémie :
« La pandémie mondiale de Covid-19 est la 6ème depuis la pandémie grippale de 1918. Les preuves scientifiques montrent que les pandémies deviennent plus fréquentes et plus meurtrières. Presque toutes les pandémies connues et 70 % des maladies émergentes trouvent leur origine dans des microbes transportés par des animaux. Mais l’émergence des pandémies est entièrement due aux activités humaines. Ces mêmes activités humaines qui sont à l’origine du changement climatique et de la perte de biodiversité sont également à l’origine du risque de pandémie à travers leurs impacts sur notre environnement.
Il s’agit notamment :
- Du changement d’utilisation des terres;
- De l’expansion et de l’intensification de l’agriculture;
- Du commerce, de la production et de la consommation non durables.
Cette exploitation non durable de l’environnement rapproche la faune sauvage, le bétail et les hommes... Et c’est la voie vers les pandémies. Le changement d’utilisation des terres est à lui seul responsable de plus de 30 % des nouvelles maladies depuis 1960. Et 3/4 de la surface terrestre est altérée de manière significative par les actions humaines. Le risque de pandémie peut être réduit en s’attaquant à bon nombre des mêmes facteurs que ceux de la perte de la biodiversité et du changement climatique... Pour un coût estimé à 100 fois inférieur à celui des conséquences économiques actuelles des pandémies. Les preuves scientifiques accablantes indiquent une conclusion très positive : mieux vaut prévenir que guérir (et c’est moins cher) ! »
Revue de web :
Communiqué de presse du rapport de l'atelier « Échapper à l’ère des pandémies », Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques(IPBES), 29 oct 2020
« La pandémie de COVID-19 est au moins la sixième pandémie mondiale depuis la pandémie grippale de 1918, et bien qu'elle trouve son origine dans des microbes portés par des animaux, comme toutes les pandémies, son émergence a été entièrement déterminée par les activités humaines.
« Il n'y a pas de grand mystère sur la cause de la pandémie de COVID-19, ou de toute autre pandémie moderne », a déclaré le Dr.Peter Daszak, président de EcoHealth Alliance et de l'atelier d’IPBES. « Ce sont les mêmes activités humaines qui sont à l'origine du changement climatique, de la perte de biodiversité et, de par leurs impacts sur notre environnement, du risque de pandémie. Les changements dans la manière dont nous utilisons les terres, l'expansion et l'intensification de l'agriculture, ainsi que le commerce, la production et la consommation non durables perturbent la nature et augmentent les contacts entre la faune sauvage, le bétail, les agents pathogènes et les êtres humains. C'est un chemin qui conduit droit aux pandémies. » (...)
Le rapport de l'atelier IPBES constitue une des évaluations les plus solides sur le plan scientifique des preuves et des connaissances concernant les liens entre le risque de pandémie et la nature depuis le début de la pandémie de COVID, grâce à des contributions d'experts de premier plan dans des domaines aussi divers que l'épidémiologie, la zoologie, la santé publique, l'écologie des maladies, la pathologie comparative, la médecine vétérinaire, la pharmacologie, la santé de la faune sauvage, la modélisation mathématique, l'économie, le droit et les politiques publiques. Le rapport est également fortement étayé scientifiquement, avec près de 700 sources citées (dont plus de 200 datant des années 2019 et 2020), ce qui offre aux décideurs un précieux aperçu analytique des données les plus récentes actuellement disponibles. » Le résumé à l'attention des décideurs (en anglais)
« Pour stopper le changement climatique nous avons besoins d'un léninisme écologique », une interview avec Andreas Malm (en anglais), Jacobin Magazine, 15 juin 2020 :
« Pouvez-vous commencer par expliquer la relation entre la pandémie actuelle de COVID-19 et le changement climatique mondial ?
Très tôt au cours de la pandémie, les commentateurs ont commencé à établir des comparaisons entre la crise COVID-19 et la crise climatique. Toutefois, je soutiens que ces comparaisons directes sont erronées dans le sens où la pandémie actuelle constitue un événement spécifique, alors que le réchauffement climatique est une tendance durable. Néanmoins, nous passons à côté de l’essence de la crise COVID-19 si nous ne la reconnaissons pas pour ce qu’elle est, à savoir une manifestation extrême - mais attendue depuis longtemps - d’une autre tendance séculaire : l’augmentation du taux de maladies infectieuses passant des animaux sauvages aux populations humaines. Il s’agit d’une tendance qui s’est accentuée au cours des dernières décennies et qui devrait s’accélérer à l’avenir.
La principale force motrice de la production de pandémies apparaît clairement dans la littérature scientifique et c’est la déforestation - qui est également le deuxième plus grand contributeur au changement climatique mondial. C’est dans les forêts tropicales que l’on trouve la plus grande biodiversité sur Terre, et cette biodiversité comprend des agents pathogènes. Ces agents pathogènes, qui circulent parmi les animaux non humains dans les habitats sauvages, ne posent généralement pas de problème à l’humanité tant que les humains s’en tiennent à l’écart. Cependant, le problème se pose à mesure que l’économie humaine fait des incursions de plus en plus profondes dans ces habitats. Le déboisement des forêts pour l’exploitation forestière, l’agriculture, l’exploitation minière et la construction de routes crée de nouvelles interfaces où les humains entrent en contact avec la faune sauvage. Grâce à ces interfaces, les agents pathogènes des animaux sont capables de muter et de se propager dans les populations humaines par un processus appelé « propagation zoonotique ».
Le réchauffement climatique lui-même accélère également cette tendance. Avec l’augmentation des températures, certains animaux sont contraints de migrer à la recherche de climats qui correspondent à ceux auxquels ils sont adaptés. Il s’ensuit un chaos généralisé dans lequel les populations animales - dont, de manière significative, les chauves-souris - sont de plus en plus mises en contact avec les populations humaines, ce qui augmente le taux de transmission. Il existe plus de 1 200 espèces différentes de chauves-souris, mais elles partagent toutes un trait commun qui les rend uniques parmi les mammifères, à savoir leur capacité à voler de manière prolongée. Cette caractéristique commune les rend non seulement très mobiles et donc susceptibles de migrer en raison du changement climatique, mais elle nécessite également de prodigieuses quantités d’énergie, ce qui pousse les taux métaboliques à un point tel que la température corporelle atteint 40 °C pendant de nombreuses heures, un niveau qui serait ressenti comme de la fièvre par la plupart des autres mammifères. Ce processus a été considéré comme la raison principale pour laquelle les chauves-souris sont le principal vecteur d’agents pathogènes tels que les coronavirus. Les virus qui se fixent sur ces animaux doivent s’adapter à leur température corporelle fébrile. Bien que ces agents pathogènes n’affaiblissent pas le système immunitaire de leurs hôtes chauves-souris, ils peuvent vaincre le système immunitaire d’autres animaux, s’ils sont capables de passer à travers eux. Partout dans le monde, les chauves-souris sont déplacées par la déforestation et poussées vers des latitudes plus élevées par la hausse des températures, et la Chine ne fait pas exception. Les populations de chauves-souris ont été de plus en plus repoussées vers le nord et le centre de la Chine et se sont rapprochées de zones à forte densité démographique humaine, créant ainsi de plus en plus de nouvelles interfaces à travers lesquelles des contagions zoonotiques peuvent se produire.
Ce ne sont là que quelques-uns des liens de cause à effet entre la crise COVID-19 et la crise climatique. Bien qu’il faille faire une distinction, les deux tendances du réchauffement et de la maladie mondiale sont entrelacées par toute une série de facteurs de causalité différents et, en tant que telles, constituent deux dimensions de la catastrophe écologique plus vaste qui se poursuit. »
Covid-19 ou la pandémie d’une biodiversité maltraitée par Philippe Grandcolas Directeur de recherche CNRS, systématicien et Jean-Lou Justine Professeur, Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité, The Conversation, 25 mars 2020 :
« Il faut (…) souligner que la Covid-19, tout comme d’autres épidémies majeures (SIDA, Ebola, SRAS, etc.), n’est pas sans rapport avec la crise de la biodiversité et du climat que nous connaissons.
Nouveaux agents pathogènes
Nous détruisons les milieux naturels à un rythme accéléré : 100 millions d’hectares de forêt tropicale coupés entre 1980 et 2000 ; plus de 85 % des zones humides supprimées depuis le début de l’époque industrielle.
Ce faisant, nous mettons en contact des populations humaines, souvent en état de santé précaire, avec de nouveaux agents pathogènes. Les réservoirs de ces pathogènes sont des animaux sauvages habituellement cantonnés aux milieux dans lesquels l’espèce humaine est quasiment absente ou en petites populations isolées. Du fait de la destruction des forêts, les villageois installés en lisière de déboisement chassent et envoient de la viande contaminée vers des grandes villes. (…)
En 2007, la conclusion d’un article scientifique majeur sur cette épidémie du SRAS dénonçait :
« La présence d’un réservoir important de virus de type SARS-CoV dans les chauves-souris Rhinolophidae combiné avec l’élevage pour la consommation de mammifères exotiques dans le sud de la Chine est une bombe à retardement. » (…)
Le danger des zoonoses [1]
La consommation et l’import-export d’animaux exotiques ont deux conséquences majeures. Ils augmentent d’une part le risque d’épidémie en nous mettant en contact avec des agents infectieux rares. Mais souvent ces agents infectieux sont spécialisés sur une espèce et ne peuvent pénétrer notre corps, vaincre notre système immunitaire, voire même pénétrer et utiliser nos cellules, comme dans le cas des virus. Les trafics mettant en présence divers animaux permettent aux agents infectieux portés de recombiner et d’être ainsi capable de franchir la barrière entre espèces, comme cela a été le cas pour le SRAS et comme cela semble être peut être le cas pour le Covid-19. (…)
Il faut rappeler que plus des deux tiers des maladies émergentes sont des zoonoses, c’est-à-dire des maladies dont le réservoir de l’agent infectieux est un animal ; parmi ces zoonoses, la majorité provient d’animaux sauvages. (…)
Nous nous mettons ainsi doublement en danger : « création » de maladies émergentes et destruction d’une biodiversité fragile qui assume des rôles dans les équilibres naturels dont nous bénéficions. (…)
Prévenir les pandémies
Une fois de plus, quand il s’agit de biodiversité, les causes des crises sont connues et les remèdes aussi : quand allons-nous enfin appliquer les remèdes ? La solution serait d’arrêter la destruction de l’environnement dans les pays du Sud – la déforestation, le transport d’animaux exotiques, le commerce mondial de n’importe quelle denrée ou espèce vivante – pour gagner quelques pour cent de rentabilité par rapport à des productions locales ou des circuits courts… »
La crise de la biodiversité favorise les maladies infectieuses émergentes, Charlie Hebdo, 27 fév 2020 :
« Serge Morand, chercheur, spécialiste en écologie parasitaire, est l'auteur de “La prochaine peste. Une histoire globale des maladies infectieuses”. Il explique en quoi le monde moderne participe à l'apparition de ces nouveaux virus :
(…) Il faut des conditions favorables à la transmission de l’agent infectieux. Celles-ci dépendent de facteurs socio-écologiques en lien avec l’intensification agronomique et l’importance de l’élevage qui favorisent la transmission interspécifique des agents infectieux entre l’animal sauvage et l’animal domestique, puis les passages vers les humains. Ces conditions sont encore plus favorables quand l’intensification agronomique et d’élevage se couplent d’une intégration dans le marché régional ou international. Les pays de la zone intertropicale asiatique offrent les opportunités de transmission, sachant que leur poids démographique favorise également la transmission : la moitié de la population mondiale vit dans un cercle comprenant l’Inde, l’Asie du Sud, la Chine du Sud et le sud du Japon. La Chine du Sud et l’Asie du Sud-Est présentent toutes ces caractéristiques de biodiversité, d’intensification agronomique et d’élevage (qui entraîne une crise de la biodiversité) et d’intégration dans le marché international et touristique. C’est donc l’endroit parfait pour l’émergence d’une nouvelle maladie infectieuse à potentiel pandémique. (…)
Pourquoi faites-vous le lien entre la crise de la biodiversité en Asie et les maladies infectieuses émergentes ?
Nous avons maintenant suffisamment d’exemples d’émergence ou d’augmentation de l’incidence de maladies infectieuses diverses en lien avec les modifications des habitats, les transformations des forêts en plantations industrielles de palmiers à huile, de tecks, ou d’hévéas, en association avec l’augmentation vertigineuse de la production d’animaux pour la consommation (vaches, poules, cochons, œufs, lait). Ces modifications favorisent les échanges entre les animaux sauvages (dont les territoires s’amenuisent), les animaux domestiques (dont les territoires et les densités augmentent) et les humains. De plus, les élevages d’animaux sauvages pour la consommation, pour le marché des nouveaux animaux de compagnie ou pour les « besoins » du marché international, comme dans le cas de la civette asiatique (kopi luwak) pour la production du « café civette » constituent de nouveaux risques. (…)
Les travaux démontrent qu’un monde connecté par la marchandise est un monde connecté par la circulation des maladies affectant humains, animaux et plantes. Mais nous n’en tenons pas compte. Nous allons donc de crise en crise et tout ce que nous faisons est seulement de nous préparer pour la prochaine, sans s’attaquer au fondement des origines de ces crises, c’est-à-dire à ces interactions particulières entre le social, l’écologique, le biologique et le microbe. (…)
Pour ce faire, il faut démondialiser nos économies, relocaliser les activités économiques et surtout celles des productions agricoles. L’environnement y gagnera, le climat y gagnera, la biodiversité y gagnera, nos agriculteurs d’ici et d’ailleurs y gagneront, notre santé et notre bien-être y gagneront. »
Des chauve-souris et des hommes : politiques épidémiques et coronavirus - Entretien avec l’anthropologue Frédéric Keck, Lundi matin, 21 mars 2020 :
« Les mesures de quarantaine, de confinement, et de surveillance arrivent toujours trop tard. Elles ne font qu’amoindrir des effets déjà actifs et envahissants, mais n’agissent en rien sur les causes du problème. Le Covid-19 est, rappelons-le, une zoonose : une maladie qui s’est transmise des animaux aux humains. C’est précisément dans nos rapports aux animaux qu’il faut chercher la raison de nombreuses crises sanitaires récentes : ESB, SRAS, grippes « aviaire » et « porcine ». Nous avons donc interrogé Frédéric Keck, un anthropologue qui travaille sur les normes de « biosécurité » appliquées aux humains et aux animaux, et sur les formes de prévision qu’elles produisent à l’égard des catastrophes sanitaires et écologiques.
(…) les grands récits comme celui de Jared Diamond expliquant les nouvelles maladies infectieuses par une transformation majeure des relations entre humains et animaux depuis la révolution néolithique, après laquelle les espèces domestiquées par les humains leur ont transmis des maladies du fait de leur plus grande proximité. On estime que la révolution de l’élevage industriel qui a eu lieu dans les années 1960 a eu un effet comparable de production de nouvelles maladies. (…)
l’épidémie de coronavirus (Covid-19) est une question écologique ?
L’écologie des maladies infectieuses (...) alerte sur l’émergence de nouvelles maladies infectieuses du fait des transformations que l’espèce humaine impose à son environnement : élevage industriel, déforestation, appauvrissement des sols – on ne parlait pas encore du réchauffement climatique, qui cause les pandémies de Zika ou de dengue en conduisant les populations de moustiques à se déplacer hors de leurs habitats. J’ai étudié la façon dont ces alertes ont été transcrites en scénarios catastrophe par les virologistes et les épidémiologistes à l’occasion de quelques crises en Chine. Il reste à comprendre en quoi la pandémie actuelle non seulement oblige l’humanité à changer son mode de vie en ralentissant la circulation des personnes et des marchandises, mais surtout accélère les scénarios catastrophe qui ont été construits à partir d’autres phénomènes écologiques en faisant peur aux gouvernements. On peut dire que les nouvelles épidémies forcent à poser collectivement les questions écologiques qui pouvaient sembler réservées à une minorité. »
Maladies infectieuses : la grande accélération, La Dépêche vétérinaire, 23 nov 2019 (PDF) :
« Voici le deuxième article de la série traitant des variations actuelles de la biodiversité. Il concerne l'impact de la crise actuelle de la biodiversité sur l'émergence de certaines pathologies infectieuses. »
« (…) Le rôle des écosystèmes
Des pressions majeures s’exercent sur les écosystèmes et négliger leur rôle dans le maintien et la propagation des maladies infectieuses revient à ignorer un des facteurs importants de la dynamique de ces dernières.
Les maladies sont ainsi évidemment sensibles à la mondialisation des échanges ou au changement climatique, des corrélations très claires ont été établies entre la diffusion des épidémies et les routes commerciales ou encore le réchauffement climatique et la propagation des pathogènes et de leurs vecteurs vers le nord. Mais d’autres pressions ont aussi des effets majeurs sur les maladies en particulier, car elles modifient les écosystèmes et les populations vivantes associées.
Si on observe à l’échelle mondiale une bonne corrélation entre le nombre de maladies infectieuses décrites dans un pays et le nombre d’espèces de vertébrés qui y sont recensées, une seconde corrélation intéressante est le nombre d’épidémies déclarées par pays et le nombre d’espèces de mammifères et d’oiseaux répertoriées en danger. Une baisse de la diversité génétique des hôtes s’accompagne souvent d’une baisse de la diversité de leurs pathogènes, mais d’une augmentation en fréquence et en ampleur des épidémies. Tout se passe comme si les systèmes biologiques, écosystèmes, communautés ou populations perdent leurs propriétés de régulation de leurs pathogènes quand ils perdent en diversité, spécifique ou génétique.
La pression anthropique sur la nature peut aussi se traduire par une augmentation de l’appropriation par les hommes de la productivité primaire biologique et donc de l’énergie nécessaire aux écosystèmes. La réponse directe des écosystèmes est la perte de biodiversité, qui peut s’apprécier par le nombre d’espèces d’oiseaux et de mammifères en danger selon la liste rouge de l’IUCN (Union internationale pour la conservation de la nature) et par une baisse des services écosystémiques, dont les services de régulation des maladies infectieuses. Ainsi, plus cette appropriation augmente et plus le nombre d’épidémies de maladies infectieuses zoonotiques augmente. La transformation des écosystèmes diminue mécaniquement la biodiversité et peut faire craindre à une augmentation des crises sanitaires.
La destruction et la fragmentation des habitats
La déforestation a des conséquences importantes sur les populations d’animaux sauvages. Lorsque leurs habitats ou leurs ressources alimentaires sont détruits, ces populations s’effondrent, c’est le cas par exemple de l’Orang-Outang à Sumatra et Bornéo. Une autre possibilité est qu’elles se déplacent, elles sont alors plus en contact avec les hommes et leurs animaux domestiques.
C’est ce qui s’est passé à la fin des années 1990 pour les chauve-souris qui vivaient à Bornéo, elles ont été poussées à migrer vers les abords des villes à la suite de la destruction des forêts sous la pression cumulée de l’avancée des plantations de palmiers à huile et des feux générés par le phénomène El Niño. Or, ces chauves-souris (notamment le genre Pteropus) sont porteuses naturelles du paramyxovirus Nipah dont l’émergence chez l’homme a causé en un an (septembre 1998 — décembre 1999) 283 cas d’encéphalite dont 109 mortels en Malaisie. Des litchis, issus de pieds plantés au-dessus des porcheries pour les ombrager, servaient de nourriture à la fois aux cochons et aux roussettes chassées de leur habitat naturel. L’hôte intermédiaire, dans ce cas le cochon, s’est trouvé en contact avec les chauve-souris, ce qui a favorisé la transmission du virus à l’homme. Plus d’un million de cochons ont été abattus, un contrôle strict du statut sanitaire des porcs a été mis en place par Singapour pour limiter la diffusion de la maladie. Cette crise a été à l’origine d’une restructuration sans précédent du marché régional des viandes porcines, sans pour autant que l’infection ne soit complètement stoppée. »
Fièvre mondiale, un compte-rendu de « Corona, Climat, Urgence chronique : Communisme de Guerre au Vingt-et-unième Siècle » (en anglais), Gareth Dale, 1 août
2020 :
« (...) Le fléau mondial
Dans le premier chapitre, l’accent est mis sur les différences. Les gouvernements ont agi pour contenir le virus tout en traînant les pieds en matière d’émissions de carbone. Mais maintenant, dans un revirement soigné, nous regardons par la fenêtre de l’autre côté. La plupart des gouvernements n’ont pas fait assez pour contrer la pandémie, même s’ils étaient au courant de son arrivée inévitable et l’avaient prévue, du moins officiellement. De même, ils réagissent bien sûr au réchauffement de la planète, mais principalement par des demi-mesures et des palliatifs. Les feux de forêt brûlent, l’état d’urgence est déclaré, les pompiers interviennent. Et, en effet, il en va de même pour le virus. Ni avec le virus ni avec le changement climatique, les gouvernements ne s’attaquent aux causes. Et par virus, j’entends ici non seulement la Covid-19, mais aussi la multiplication des agents pathogènes au cours des dernières décennies, qui reflète les taux croissants de propagation des zoonoses. Malm appelle cela « l’état maladif mondial ». Son « urgence chronique » est celle du réchauffement et de l’état maladif de la planète - une fièvre mondiale, pourrait-on dire.
Dans ce chapitre, peut-être le plus brillant, Malm, s’inspirant de Mike Davis et de Rob Wallace, traite de l’augmentation et de la portée épidémique des virus en tant que produits des forces capitalistes. Il s’agit notamment de l’agriculture industrielle, de la déforestation, du commerce de luxe des animaux sauvages et de l’aviation. La plupart d’entre eux sont également des facteurs de dégradation du climat.
Pour l'apparition de virus, le défrichement des forêts est particulièrement propice. À mesure que les bulldozers et les pyromanes rémunérés empiètent sur la forêt, la faune est confinée dans des îlots d’habitation de plus en plus petits. À mesure que les zones de contact se multiplient, des espèces normalement isolées sont jetées en contact étroit avec les animaux de ferme et les humains, ce qui multiplie les voies de recombinaison et de propagation des agents pathogènes. Les leviers capitalistes que décrit Malm ne se réfèrent pas simplement à la demande de mets délicats tels que la chair de pangolin (« le marché de l’extinction fait partie de la vie des 1 % ») mais à l’organisation de la demande mondiale dans son ensemble, organisée par « un échange écologiquement inégal ». La demande du Nord, écrit-il, et de plus en plus, j’ajouterais, de l’Asie de l’Est, « est un facteur profond de déforestation, donc de perte de biodiversité, donc de débordement zoonotique ». Un tiers de toutes les menaces existentielles qui pèsent sur les espèces animales sont directement attribuables à la demande des pays riches pour des produits tels que le café, le bœuf, le thé, le sucre et l’huile de palme. C’est comme si la société capitaliste avait décidé de « soulever le conteneur du coronavirus et d’autres agents pathogènes et de se le verser dessus ». Ou, pour changer de métaphore (et je ne saurais trop insister, Malm est un plaisir à lire), on peut voir la Covid-19 comme « le premier boomerang de la sixième extinction de masse à frapper l’humanité au front ».
Pour illustrer le processus d’échange écologique inégal, Malm donne un exemple en Amazonie : un lieu de forage où « la compagnie pétrolière brésilienne Petrobras pompe du pétrole et du gaz et les achemine dans des pipelines construits par la compagnie suédoise Skanska, maintenant exploités par la multinationale française Engie ». Cette opération d’extraction de combustibles fossiles et bien d’autres similaires combinent « les moteurs du changement climatique et des retombées zoonotiques dans un seul bulldozer ». (...)
Non seulement certains des principaux facteurs de la prolifération des agents pathogènes et du changement climatique sont identiques, comme le montre Malm, mais le réchauffement de la planète exacerbe l’état maladif de la planète. L’augmentation des températures impose un stress aux animaux, les obligeant à adopter des comportements inconfortables et à migrer, au grand plaisir des virus. « Pour les agents pathogènes longtemps accoutumés à un mode de vie relativement monogame, ce seront des moments de débauche : des troupeaux de nouveaux animaux défilent, comme un marché de viande réapprovisionné chaque matin - autant d’occasions de sauter [d’une espèce à l’autre] ». Les chauves-souris, en particulier, sont contraintes de fuir, ce qui génère un potentiel particulièrement élevé de contagion zoonotique. Le virus Nipah en est un exemple. Lorsqu’il a éclaté chez les éleveurs de porcs malaisiens en 1999, certaines chauves-souris qui avaient essaimé vers les élevages de porcs et déversé leur chargement de Nipah, échappaient aux incendies de 1997-1998 ; ceux-ci avaient à leur tour été allumés par la sécheresse provoquée par le phénomène climatique chronique El Niño de 1990-1995, le plus long jamais enregistré. Certaines des chauves-souris qui ont transporté la Covid à Wuhan, demande Malm, auraient-elles pu également être des « fugueuses de la chaleur » ? Nous n’en sommes pas sûrs. Mais les trois épidémies de coronavirus survenues depuis le début du millénaire ont été liées à l’aridité : Le SRAS à une sécheresse épique dans le Guangdong, le MERS dans le Jedda sans pluie, tandis que le SRAS-CoV-2 a éclaté au milieu de la pire sécheresse dans la région de Wuhan en quarante ans (...) . »
Covid-19 : la maladie de l’anthopocène [2]
Voici un court article paru dans le journal « Environmental research » publié en ligne le 15 mai 2020 ; les auteurs, Cristina O’Callaghan-Gordoa et Josep M. Antób travaillent à « Faculty of Health Sciences, Universitat Oberta de Catalunya; ISGlobal; Universitat Pompeu Fabra (UPF); CIBER Epidemiología y Salud Pública (CIBERESP), Barcelona, Spain ».
O’Callaghan-Gordo, C., & Antó, J. M. (2020). Covid-19 : The disease of the anthropocene. Environmental research, 187, 109683. https://doi.org/10.1016/j.envres.2020.109683
Voir la publication pour accéder aux références. Traduction par DeepL. Liens, notes et passages en gras de mon fait.
Un antécédent proche et tragique de la Covid-19 est le syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA) causé par une infection au virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Cette maladie a été découverte en 1981, et en 2018, elle avait touché environ 40 millions de personnes et causé plus de 750 000 décès. Les virus VIH sont le résultat de multiples transmissions entre espèces de virus d’immunodéficience qui infectent naturellement les primates africains. La plupart de ces transferts ont probablement donné lieu à des virus qui se sont propagés de manière limitée chez l’homme jusqu’à ce que l’une de ces transmissions, qui impliquait un virus d’immunodéficience provenant de chimpanzés du sud-est du Cameroun, soit la principale cause de la pandémie chez l’homme (Sharp et Hahn, 2011). La transmission d’un virus d’une espèce animale sauvage à l’homme n’est pas un événement rare. En fait, une forte proportion des agents pathogènes humains sont zoonotiques [2] ou étaient d’origine zoonotique avant d’être transmis uniquement aux humains (Wolfe et al., 2007). Depuis l’émergence du sida, de nombreuses autres maladies infectieuses épidémiques, telles que le virus Ebola, le SRAS [syndrome respiratoire aigu sévère] et le MERS [syndrome respiratoire du Moyen-Orient] pour ne citer que les plus récentes, ont été causées par la transmission de virus d’espèces animales sauvages à l’homme, comme l’ont montré en 2008 Jones et al. qui ont identifié 335 maladies infectieuses émergentes entre 1960 et 2004, et ont constaté qu’au moins 60 % de ces maladies provenaient d’animaux non humains (Jones et al., 2008).
Ces transmissions entre les espèces animales non humaines et humaines ne sont pas nécessairement le fruit du hasard. Il existe des preuves solides que les changements écologiques ont entraîné une augmentation des taux de maladies émergentes et réémergentes telles que la malaria, le syndrome pulmonaire à hantavirus, le virus Nipah et la maladie du virus Ebola (Myers et al., 2013). L’activité humaine transforme de plus en plus les habitats naturels et les écosystèmes de la terre en modifiant intensément les modèles et les mécanismes d’interaction entre les espèces (Myers et al., 2013) et en facilitant la transmission de maladies infectieuses entre les espèces et aux humains (Patz et al., 2005). Une étude publiée en 2014 a estimé que d’ici 2050, 25 millions de kilomètres de nouvelles routes seraient construits et que 9 sur 10 se situeraient dans les pays en développement, dont de nombreuses régions qui maintiennent une biodiversité exceptionnelle et des services écosystémiques vitaux. Ces routes entraînent souvent la perte et la fragmentation des habitats, des incendies de forêt, des débordements [inondations] et d’autres dégradations environnementales, avec des impacts souvent irréversibles sur les écosystèmes (Laurance et al., 2014). Les séquences causales complètes et les impacts de ces changements écologiques sont encore mal compris, mais fréquemment ces zoonoses émergentes apparaissent et se propagent dans des circonstances qui dénotent les effets d’une économie et de pratiques commerciales qui détruisent les habitats naturels et les populations animales, y compris celles des humains qui y vivent, en l’absence de politiques de protection et de réglementation efficaces.
Dans le cas de la Covid-19, le Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies a confirmé que le virus à l’origine de l’épidémie à Wuhan provenait d’animaux sauvages, dont la viande était vendue au marché Hankou de Wuhan, où environ 120 animaux de 75 espèces différentes étaient à la vente, certains d’entre eux vivants, tels que louveteaux, salamandres, crocodiles, scorpions, rats, écureuils, renards, civettes et tortues. Le premier groupe de patients atteints du SRAS-CoV 2 à Wuhan était principalement constitué de commerçants sur ce marché. Les circonstances de l’origine de la Covid-19 sont similaires à celles du SRAS, une épidémie dans laquelle le premier groupe de patients était également des commerçants d’animaux sauvages dans la ville de Guangdong. Peter J Li, professeur de droit à l’université de Houston, étudie depuis des années les problèmes liés à la distribution et à la vente d’animaux sauvages pour la consommation humaine en Chine. Comme Li l’a expliqué le 25 mars dans un article du South China Morning Post, toutes les activités de commerce d’animaux sauvages en Chine sont interdites depuis le 26 janvier 2020, bien que l’interdiction soit temporaire, dans le but de suspendre le commerce uniquement jusqu’à la fin de l’épidémie (Li, 2020). Ces marchés ont dû donc devenir le substrat approprié pour permettre la transmission du virus du SRAS-CoV 2 de certains animaux infectés à des commerçants et à des clients, et plus tard au reste de la population. Selon PJ Li, pendant des années, les tentatives du gouvernement chinois pour réglementer ce type de commerce de viande d’animaux sauvages ont été contrées par l’influence d’un puissant lobby commercial, dont les bénéfices dépendent du maintien de l’accès à la consommation de ces animaux par un secteur majoritairement riche de la société chinoise. Pour compléter la chaîne de causalité, les mises en garde des scientifiques sur les effets potentiellement catastrophiques du risque d’émergence de maladies infectieuses n’ont souvent pas été entendues. Dans le cas de la précédente épidémie de SRAS, le commerce des chauves-souris a probablement mis les animaux infectés en contact avec des hôtes amplificateurs sensibles, tels que la civette palmiste masquée Paguma larvata à un endroit de la chaîne d’approvisionnement en faune sauvage, établissant un cycle dans lequel les personnes sensibles ont ensuite été infectées (Fèvre et al., 2006). Zhong Nanshan et Guan Yi, deux experts bien connus du SRAS, avaient précédemment averti de la possibilité d’une pandémie provenant des marchés de viande sauvage en Chine et de la nécessité d’interdire de telles pratiques commerciales (Li, 2020).
John Vidal, dans un article récent, a souligné de façon convaincante le lien entre la Covid-19 et la santé de la planète (Vidal, 2020). En effet, nous suggérons que la Covid-19 est un exemple paradigmatique d’une maladie anthropocène. Elle suit une séquence complexe impliquant la perturbation des systèmes naturels, sociaux, économiques et de gouvernance. La destruction des habitats naturels et l’extinction des espèces, la capture, la commercialisation et la consommation mal réglementées d’animaux non humains, l’influence des lobbies pour annuler ou retarder les mesures de protection des systèmes naturels et sociaux, la limitation des connaissances scientifiques actuelles et le mépris des gouvernements et des entreprises pour les preuves disponibles, tout cela a fonctionné selon une séquence orchestrée pour faciliter la pandémie actuelle de Covid-19. Cette séquence de causes ultimes est étroitement liée à la crise climatique mondiale et au reste des perturbations environnementales de l’anthropocène. La consommation de combustibles fossiles à des fins énergétiques, la déforestation et la conversion d’habitats naturels en terres agricoles ou en élevage extensif figurent parmi les principales sources d’émissions de gaz à effet de serre, et facilitent en même temps l’émergence de nouvelles zoonoses, comme le SRAS-CoV-2, avec un potentiel pandémique. L’extraction de pétrole et de bois dans les zones de forêt primaire implique l’ouverture de routes dans les zones difficiles d’accès, encourageant le contact entre les humains et la faune et facilitant la chasse et la consommation de viande de brousse (Wolfe et al., 2005). L’avancement de la frontière agricole pour répondre aux systèmes alimentaires actuels augmente la fréquence des écotones[3], des zones clés dans l’apparition des maladies infectieuses (Rohr et al., 2019). Et en même temps, la destruction des habitats causée par ces activités est la principale cause de la perte de biodiversité, qui est également associée à l’émergence de maladies infectieuses (Civitello et al., 2015).
Pour contrôler la Covid-19, l’approche doit être axée sur la protection de la santé humaine grâce à des stratégies de prévention et de contrôle fondées sur des données probantes, des traitements efficaces pour les patients, des vaccins pour prévenir l’infection et la préparation des systèmes de santé à faire face à une charge énorme. Toutefois, aussi nécessaire que cela soit, une réponse axée sur la santé humaine débouchera sur une vision à courte vue. Nous devons envisager COVID-19 dans la perspective de la santé planétaire, c’est-à-dire comprendre que la réponse à la pandémie doit être non seulement la bonne pour les humains mais aussi la bonne pour la planète. Ce point est particulièrement pertinent lorsque nous comprenons que la COVID-19 a la même origine que le changement climatique et la dégradation de l’environnement mondial, les plus grands défis auxquels nous sommes confrontés en tant qu’humanité. La prévention de la transmission croisée de virus d’espèces animales non humaines aux humains devient une autre raison impérieuse de plaider d’urgence pour la préservation des écosystèmes naturels et d’arrêter l’extinction massive des espèces menacées. De même, la protection des droits des animaux devient un élément clé de la réglementation de la consommation humaine de viande animale dans le cadre de systèmes de production, de commercialisation et de consommation alimentaires durables. Les marchés, tant alimentaires que des valeurs mobilières [actions, obligations], doivent être réglementés efficacement afin que les profits privés ne deviennent pas des tragédies publiques. Ces solutions doivent être alignées avec la réduction des inégalités internes [nationales] et des inégalités nord-sud, tout en respectant la diversité mondiale. Si la pandémie s’atténue sans causer de perturbations encore plus grandes à l’échelle mondiale, et si nous pouvons tous retrouver la stabilité précaire dans laquelle nous vivions, le véritable défi continuera d’être de transformer notre civilisation en une société juste et durable, en atteignant un niveau zéro d’émissions de gaz à effet de serre au plus tard en 2050, ceci est la grande course contre la montre de l’humanité. L’importance du programme de développement durable pour 2030 est donc primordiale.
1. Les zoonoses sont des maladies ou infections qui se transmettent des animaux vertébrés à l'homme, et vice versa. Les pathogènes en cause peuvent être des bactéries, des virus ou des parasites. La transmission de ces maladies se fait soit directement, lors d'un contact entre un animal et un être humain, soit indirectement par voie alimentaire ou par l’intermédiaire d'un vecteur (insecte, arachnides…). D'après l'Organisation mondiale de la santé animale, 60% des maladies infectieuses humaines sont zoonotiques. (Ministère de l'agriculture).
2. L’anthropocène est une époque de l’histoire de la Terre qui a été proposée pour caractériser l’ensemble des événements géologiques qui se sont produits depuis que les activités humaines ont une incidence globale significative sur l’écosystème terrestre (Wikipedia).
3. Un écotone est une zone de transition écologique entre deux écosystèmes. Par exemple, le passage de la savane à la forêt, ou le passage d’une plaine alluviale à une zone non inondable. En écologie du paysage, il correspond à une lisière (Wikipedia).
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