Un texte de André-Jacques Holbecq (sociétal.org) récupéré sur Plus loin que Jorion
Mais d’abord, qu’est ce que la monnaie ?
C’est, dans une définition
simplifiée, un moyen de paiement, une unité de compte commune, et une
réserve de valeur. C’est un palliatif aux nombreux problèmes du troc
direct ou indirect.
La monnaie possède deux grandes qualités qui la rendent indispensable:
- immédiatement disponible et sans coût (elle est « liquide »),
- présente peu de risque de perte de valeur en l’absence d’une inflation forte.
- immédiatement disponible et sans coût (elle est « liquide »),
- présente peu de risque de perte de valeur en l’absence d’une inflation forte.
Le fondement de l’existence de la monnaie est la confiance
Maintenant admettez avec moi, ce qui est
la stricte réalité, que de la même manière qu’un informaticien produit
un programme informatique à partir d’un ordinateur, ou qu’un fabriquant
de chaussure fabrique des chaussures, un réseau bancaire fabrique de la
monnaie Les banques sont des fabricants de monnaie, sous leur marque
de fabrique : la monnaie BNP, la monnaie SG, la monnaie crédit agricole,
etc…
Les crédits sont la principale source de création de monnaie
Le mécanisme de création de monnaie
trouve son origine dans les crédits accordés par la banque. Le principe
du crédit consiste à transformer des créances sur les agents non
bancaires en moyens de paiement immédiatement utilisables. Concrètement,
lorsqu’une banque consent un crédit à un client X, ce dernier dispose
immédiatement d’un dépôt à vue (compte de dépôt), dans cette banque,
égal au montant de la somme prêtée. De son côté, la banque acquiert en
contrepartie une créance sur le client X ( la créance peut être une
reconnaissance de dette, une hypothèque, une obligation, une caution,
etc… c’est une garantie au banquier qu’il sera remboursé avec les
intérêts demandés . Certains actifs sont pourris car leur valeur à
l’actif du bilan de la banque est considérée comme non récupérable en
totalité ou partie).
Mais ici il y a une petite astuce. Le
compte du client X est inscrit dans son compte nominatif qui est, dans
le bilan de la banque, à son passif. En effet à partir du moment où elle
a accepté le crédit, elle doit ce montant à son client X qui peut
d’abord effectuer ses paiements mais aussi lui demander un
remboursement « en espèces », espèces que notre banque commerciale ne
peut pas produire (c’est une monnaie dite « fiduciaire » seulement
produite par la banque centrale)
Il y a donc création de monnaie : la
banque n’a pas ponctionné dans ses réserves ou emprunté à ses déposants
ou à la Banque Centrale pour prêter le montant au client X : elle a
simplement inscrit une créance dans son bilan : elle a fait de la
« monétisation d’actifs »
[Vous trouverez souvent le terme « monétiser », de quoi s’agit-il ? C’est
simplement le droit (légal) des banques de transformer « quelque
chose » en monnaie et procéder ainsi à l’introduction de nouveaux moyens
de paiement dans l’économie (création monétaire). Ce « quelque chose »
peut être reconnaissance de dette, une hypothèque, un actif existant,
etc..]
Destruction monétaire : le remboursement du crédit
Lorsque le client X rembourse le crédit,
la banque efface la créance de son bilan : il y a donc à ce moment
destruction de monnaie. La création de monnaie n’aura été que
provisoire. Il y a donc « création nette » de monnaie uniquement lorsque
les nouveaux crédits l’emportent sur les crédits remboursés : c’est
l’image du robinet et de la bonde plus ou moins ouverts ou fermés : la
masse monétaire est le niveau de la baignoire
On peut donc préciser que la monnaie est
une dette de banque qui circule, un élément (un morceau) du passif d’une
banque accepté comme moyen de paiement. Même la monnaie fiduciaire que
nous utilisons doit son existence à une création de monnaie scripturale
originelle qui a été détruite et remplacée par cette monnaie fiduciaire.
Toute monnaie est une dette,
toute la monnaie est issue d’une création monétaire bancaire « ex
nihilo », par l’opération de « monétisation d’actif »
Autres méthodes de monétisation (création monétaire)
Les banques peuvent créer de la monnaie de plusieurs autres façons, mais avec le même mécanisme.
- les banques peuvent créditer le compte d’un agent en échange de
devises (exportations) en acquérant une créance sur les États-Unis s’il
s’agit par exemple de dollars. La balance commerciale d’un pays est
excédentaire, l’entrée nette de devises sur le territoire entraîne de la
création de monnaie, et inversement en cas de déficit commercial.
Au final les banques (commerciales) ont de nombreuses manières de créer de la monnaie:
- Opération de crédit
- Opération de crédit
- Acquisition d’un actif réel (terrain, immeuble…)
- Acquisition d’un actif financier (actions, obligations d’entreprises)
- Acquisition d’un actif financier (actions, obligations d’entreprises)
- Acquisition des bon du Trésor (créances sur le Trésor).
- Conversion des devises (suite exportation d’une entreprise cliente)
- Opération d’escompte
- Paiements pour compte propre (ex : loyers, salaires et charges diverses)
- Conversion des devises (suite exportation d’une entreprise cliente)
- Opération d’escompte
- Paiements pour compte propre (ex : loyers, salaires et charges diverses)
Je disais que chaque réseau bancaire crée
sa monnaie sous sa marque de fabrique. Les autres banques ne vont donc
pas l’accepter, ce qui implique que chaque banque dispose de monnaie
dite « de base » (ou monnaie centrale) car chaque réseau bancaire qui
monétise est obligé de tenir compte des « fuites » vers ses concurrents
si sa part de marché de monétisation (de crédit) dépasse sa part de
marché des dépôts, car ses concurrentes se font payer la différence (la
compensation) en monnaie centrale.
Les banques doivent aussi tenir compte de
la demande d’espèces (qui représente environ 13% des crédits) et des
réserves obligatoires de 2% du montant des dépôts qui correspondent à de
la monnaie centrale, ce qui limite leur capacités de création monétaire
A propos de ce multiplicateur, il est
tout théorique: on préfère dans l’état actuel parler de « diviseur »,
sachant que les banques font tous les crédits qu’elles veulent (dont
elles ont la demande), dans la limite théorique des règles
prudentielles, et se tournent ensuite vers la banque centrale en disant
« on a besoin de monnaie centrale sinon le système explose… »
Et le rôle de la banque centrale dans tout cela ?
De la même manière que les banques
commerciales monétisent des créances, la banque centrale monétise des
titres de dette dits « éligibles » (titres de dettes souveraines, par
exemple) afin de :
- constituer leurs réserves (obligatoires ou non)
- disposer de soldes de compensation
- obtenir de la monnaie fiduciaire pour satisfaire les besoins d’espèces des clients des banques commerciales
- disposer de soldes de compensation
- obtenir de la monnaie fiduciaire pour satisfaire les besoins d’espèces des clients des banques commerciales
Pour information : la monnaie scripturale
centrale ne quittera pas le compte des banques à la Banque centrale
(elle ne peut être transformée en monnaie secondaire que dans une
exception notable ; que par le « tuyau » du Trésor Public qui est « la
banque de l’État)
Donc si les banques fabriquent de la monnaie, elles peuvent acheter le monde ?
Ce serait presque exact s’il n’y avait qu’un seul réseau bancaire, mais heureusement
1 – Une banque est limitée dans ses crédits par les règles de Bâle (Bâle II) qui imposent de détenir en fonds propres 8% des crédits accordés.
2 – Comme il y a, dans la réalité, plusieurs réseaux bancaires et donc un type de « fuite » supplémentaire
Un réseau bancaire A qui émets un crédit à
son client Monsieur Dupont, sait bien que tous les fournisseurs ou
commerçants que payera Monsieur Dupont ne sont pas tous dans son réseau
bancaire… il lui faudra donc payer les réseaux bancaire B, C, E, etc des
paiements qui s’échappent de son réseau.
Mais il en est de même pour les autres
réseaux dont une partie des clients payent des fournisseurs ayant leur
compte dans le réseau A.
Chaque jour donc, une « compensation »
est faite entre les différentes banques, qui ne payeront à leur
concurrentes que le solde : quand elles ont besoin de monnaie centrale,
elles peuvent également l’emprunter à leurs concurrentes (le marché
interbancaire)
Ce solde est de zéro si toutes les banques « marchent au même pas »
(Keynes), c’est à dire si – statistiquement – la part de marché des
crédits émis est égale à la part de marché des dépôts de leurs clients
(nous parlons bien de crédits et de dépôts scripturaux. Des dépôts de
monnaie fiduciaire -billets et pièces – sont une augmentation du stock
de « monnaie de base » détenue par le réseau qui en bénéficie)
Enfin, il faut bien comprendre que le
banquier directeur d’agence (trésorier d’agence), ne s’inquiète pas de
savoir s’il crée de la monnaie ou pas : le banquier-trésorier va
uniquement chercher à équilibrer ses comptes à la Banque Centrale (la «
banque des banques »), par rapport aux autres banques. Si sa banque prête trop par rapport aux autres,
c’est le système qui va la rappeler à l’ordre, car il faudra soit qu’il
s’endette auprès des autres banques (et les lignes de crédit ne sont
pas illimitées), soit qu’il mobilise des actifs sur le marché monétaire
(et là non plus, son bilan n’est pas inépuisable….).
Comment la banque centrale peut-elle influer sur la création monétaire ?
La demande de crédit, et donc la création
monétaire, suit de près l’activité économique. En période d’expansion,
la masse monétaire, dopée par les investissements et les dépenses des
agents économiques, va augmenter, et inversement en période de repli de
l’activité.
Le principal instrument des banques
centrales occidentales est la modulation des taux d’intérêt. En
augmentant ou en baissant ses taux directeurs, la banque influe sur le
coût de refinancement des banques commerciales sur le marché monétaire,
sur lequel s’échangent la monnaie « banque centrale ».
La banque centrale peut également jouer
sur le taux de réserve obligatoire imposé aux banques commerciales :
plus de réserves obligatoires bloque les banques (c’est l’outil utilisé
en particulier par la Banque centrale chinoise)
Toutefois, l’impact de la politique
monétaire sur l’activité n’est pas garanti. Par exemple, si les agents
économiques n’ont pas confiance même une baisse des taux (et donc du
coût du crédit) n’a pas d’effet significatif sur la reprise de
l’activité.
Le système actuel est instable
Le « 100% monnaie », principe général
développé par Irving Fisher et Maurice Allais, dans lequel toute la
monnaie nouvelle est créée par la Banque Centrale (banque de France)
permettrait d’éviter les à-coups de croissance économique, supprimerait
instantanément 2/3 de la dette publique, et générerait l’équivalent
d’une recette fiscale supplémentaire de l’ordre de 70 à 80 milliards
d’euros par an.
A-J Holbecq – 24 septembre 2011
Retrouvez le billet complet sur http://captainshortman.blogspot.com/
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