Le climat en France métropolitaine jusqu'à 2100

Météo-France, le Centre National de Recherches Météorologiques, le Centre Européen de Recherche et de Formation Avancée en Calcul Scientifique et l'Institut Pierre-Simon-Laplace viennent de publier leurs nouvelles projections du climat futur de la métropole française jusqu'à l'horizon 2100.

« Ces nouvelles données, très bien documentées, vont remplacer celles présentées en 2014 dans le rapport sur «Le climat de la France au 21ème siècle» à l’élaboration duquel j’avais eu le plaisir d’être associé. Même s’il y a des différences notables, avec des réchauffements un peu plus élevés en 2020, jusqu’à près de 0,5 °C dans le cas du scénario émetteur, ces deux publications sont caractérisées par une remarquable continuité. (…)

Le climat que nous connaissons aujourd’hui est globalement compatible avec les projections présentées en 1990 dans le premier rapport du GIEC. Ceci concerne aussi bien le rythme de réchauffement et son amplification dans les régions de l’Arctique que l’accélération de l’élévation du niveau de la mer ; en outre, l’intensification de certains événements extrêmes, envisagée dans le troisième rapport publié en 2001, est désormais perceptible.

Que mes collègues modélisateurs du climat (…) aient, dès les années 1980, correctement anticipé ce que nous vivons aujourd’hui, nous invite à faire confiance à ce qu’ils envisagent à horizon 2050 et au-delà. Leur message est clair : pour que les jeunes d’aujourd’hui puissent s’adapter au climat qu’ils connaîtront dans la seconde partie de ce siècle, il faut enclencher, de façon urgente, une réduction des émissions suffisamment rapide et massive pour que la neutralité carbone soit atteinte, si possible dès 2050. » Jean Jouzel, spécialiste de l'étude des glaces et des climats passés, ex-vice-président du groupe de travail n°1 du GIEC.

Les Nouvelles Projections Climatiques De Référence Pour La Métropole [extraits]

Passages en gras et [italique] rajoutés.

Le Nouveau Jeu [de données] Drias 2020

 

Simuler Le Climat

L'étude de l'évolution du climat nécessite le recours à des modèles physiques qui prennent en compte l’ensemble des équations décrivant le comportement du système climatique (composé de l’atmosphère, l’océan, les glaces marines, la végétation, les rivières…), en réponse à différentes contraintes, appelées forçages climatiques.

Les forçages climatiques sont des perturbations d’origine extérieure au système climatique qui impactent son bilan radiatif, c’est-à-dire la différence entre l’énergie reçue en provenance du Soleil et l’énergie rayonnée par la Terre vers l’espace. Ils sont de deux types : naturels, notamment liés aux variations du rayonnement solaire et aux éruptions volcaniques, ou anthropiques, dus aux activités humaines.La pression exercée par l’homme sur le climat date principalement du début de l’ère industrielle au XIXe siècle. La combustion d’énergie fossile ainsi que la modification de l’utilisation des sols, et notamment la déforestation, ont entraîné une augmentation continue de la concentration atmosphérique des Gaz à effet de serre (GES). Ces gaz se caractérisent par leur capacité à absorber puis à réémettre l’énergie rayonnée par la surface terrestre. Ils contribuent ainsi à réchauffer la surface terrestre et une partie de l’atmosphère.Les activités humaines sont également responsables de l’émission d’autres composants chimiques, tels que les aérosols (petites particules liquides ou solides en suspension dans l’air) qui perturbent aussi le bilan radiatif de manière significative, mais cette fois à la baisse, en réduisant l’énergie solaire reçue à la surface.

Les scénarios d’émission de gaz à effet de serre

Les modifications de la composition chimique de l’atmosphère et plus précisément la concentration des GES, sont la principale cause des changements climatiques observés et à venir. Modéliser le climat futur implique donc de faire des hypothèses sur l’évolution des émissions dites anthropiques de GES et d’aérosols au cours des prochaines décennies.L’évolution de ces émissions anthropiques dépend d’un ensemble de facteurs tels que la croissance démographique, le développement socio-économique, les évolutions technologiques et les choix politiques futurs. Prédire avec précision l’évolution de ces facteurs n’est pas possible, c’est pourquoi les climatologues utilisent une gamme de scénarios d’émissions de GES, dont chaque scénario correspond à une représentation plausible du comportement à venir des sociétés humaines.

Dans le cadre du cinquième rapport du Giec (2013), quatre scénarios représentatifs ont été sélectionnés parmi plus de 1000 disponibles (figure 1). Baptisés RCP (pour Representative Concentration Pathways, ou Profils représentatifs d’évolution de concentration), ils fournissent une base commune aux différentes équipes d’experts (climatologues, hydrologues, agronomes, économistes…), qui travaillent sur ce sujet.Les quatre RCP se répartissent entre deux scénarios extrêmes (les RCP2.6 et RCP8.5) et deux scénarios intermédiaires (RCP4.5 et RCP6.0). Le RCP2.6 décrit un monde vertueux, très sobre en émissions de gaz à effet de serre, dans lequel le réchauffement global reste inférieur à 2 °C par rapport aux températures préindustrielles. C'est le seul parmi les quatre scénarios qui respecterait l'accord international de Paris sur le changement climatique approuvé en décembre 2015. Le RCP8.5 décrit quant à lui un futur excluant toute politique de régulation du climat, menant à environ 5 °C de réchauffement global d’ici la fin du siècle. Les scénarios RCP4.5 et RCP6.0 décrivent des voies intermédiaires, dans lesquelles les émissions continuent de croître pendant quelques décennies, se stabilisent avant la fin du XXIe siècle, puis décroissent à un rythme plus modéré que dans le RCP2.6. (…)

[Les chiffres accolés à l'abréviation RCP correspondent au forçage radiatif pour l'année 2100. La terre reçoit le rayonnement du soleil, l'atmosphère retient une partie ce cette énergie, ce qui permet d'avoir une température compatible avec la vie, c'est l'effet de serre. Sans les activités humaines contemporaines, le bilan entre ce qui rentre et ce qui est relâché dans l'espace est stable. Depuis les débuts de l'ère industrielle, les hommes relâchent une quantité de gaz à effet de serre toujours plus importante, cela crée un déséquilibre. Une plus grande quantité d'énergie est conservé au sein du système-terre, c'est le forçage radiatif. C'est un flux, mesuré en Watts par mètre carré. Dans l'abréviation RCP4.5, 4.5 correspond à un déséquilibre moyen, calculé à la surface de la terre, de 4,5 Watts/m2 en 2100.
 

La Sélection Des Simulations Pour Le Jeu Drias-2020 (…) 

 

Encart C (…)

Pour ce présent rapport, la période de référence est 1976-2005, à ne pas confondre avec la référence utilisée pour estimer le réchauffement global planétaire dans les accords internationaux.

Référence préindustrielle (1850-1900)

Dans le cadre de l’accord international de Paris sur le changement climatique, les pays ont convenu de réduire les émissions de gaz à effet de serre afin de limiter l’augmentation de la température moyenne mondiale en dessous de 2 °C, et si possible 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels. Le choix d’une période représentative de ce climat préindustriel, c’est-à-dire « pas encore significativement influencé par l’homme » fait débat (e.g. Schurer et al., 2017), mais la période 1850-1900 est souvent utilisée. Il s’agit de la période la plus ancienne pour laquelle on dispose d’observations fiables et raisonnablement nombreuses de température à l’échelle mondiale, et l’influence humaine demeurait limitée à cette période. (…)

Sensibilité du diagnostic de réchauffement climatique à la référence utilisée

Le choix de la période de référence peut modifier la valeur des changements attendus pour différentes variables climatiques, la température notamment. (…) Ainsi avec la référence 1976-2005, le réchauffement par rapport au début du XXe siècle en France (normale 1901-1930) est de +0,8 °C, mais la moyenne des températures observées sur la période récente 2011-2019 est supérieure de +1 °C à cette référence 1976-2005.

[Vous ne pouvez pas comparer directement les données ci-dessous avec celles des rapports du GIEC.]

Le Diagnostic Du Changement Climatique En Métropole (…) 

 

Résumé pour l’évolution des températures

La température moyenne est en hausse pour les trois scénarios. Le réchauffement est continue jusqu’en fin de siècle pour le RCP4.5 et RCP8.5, avec des valeurs médianes atteignant respectivement +2,1 °C et +3,9 °C, et jusqu’à +2,7 °C et +4,9 °C dans l’enveloppe haute de la distribution.

La hausse de température est plus forte l’été dans les scénarios RCP4.5 et RCP8.5 avec respectivement +2,2 °C et +4,5 °C en valeur médiane et jusqu’à +3,3 °C et +6 °C dans l’enveloppe haute de la distribution.

Le réchauffement présente un gradient sud-est/nord-ouest sur la métropole avec une différence de 1 °C entre ces deux zones. Le réchauffement est également plus marqué en montagne : Alpes et Pyrénées notamment. (…)

Résumé pour l’évolution des précipitations

Le cumul de précipitation, moyennée à l’échelle de la France, est annoncée en légère hausse pour les trois scénarios entre +2 % et +6 % selon les horizons et scénarios. Cette hausse faible est cependant assortie d’une grande incertitude selon les modèles, pouvant inverser le signe de la tendance quel que soit le scénario. Cette incertitude est à mettre en relation avec la position particulière de notre pays dans une zone de transition climatique à l’échelle continentale, entre hausse des précipitations au nord et baisse au sud. On note une incertitude plus forte avec le RCP8.5 où en fin de siècle l’enveloppe (5 % -95 %) de notre ensemble dépasse 20 % du cumul annuel (entre -6 % et +15 %).

Cette évolution connaît une forte modulation saisonnière avec une hausse systématique en hiver, souvent supérieure à +10 % (atteignant même 40 % dans l’enveloppe supérieure du RCP8.5) et à l’inverse, une baisse quasi systématique en été, se renforçant au cours des horizons pour atteindre -10 à -20 % en fin de siècle avec les scénarios RCP4.5 et RCP8.5. À noter que l’enveloppe basse du RCP8.5 prévoit même une baisse d’un facteur 2 du cumul de précipitation en été.

Cette évolution des précipitations présente aussi une variabilité géographique sensible avec un gradient nord/sud ou nord-est/sud-ouest se traduisant par une hausse plus marquée sur la moitié nord et une baisse sur certaines régions de la moitié sud (…)

Résumé pour l’évolution des vagues de chaleur et canicules

Le nombre de jours de vagues de chaleur ou de canicules est annoncé en hausse dans tous les scénarios avec une intensité dépendant fortement du scénario et de l’horizon temporel. En fin de siècle, le nombre de jours de vagues de chaleur pourra doubler avec un scénario RCP2.6 mais être multiplié par un facteur 3 à 4 en RCP4.5 et 5 à 10 en RCP8.5.

Les nuits tropicales [températures nocturnes > 20°C] quasi inconnues dans le nord de la France pourront revenir régulièrement en scénario RCP2.6 tandis que leur nombre pourra atteindre (hors région méditerranéenne) 15 à 25 jours en scénario RCP4.5 et 30 à 50 jours en RCP8.5.

Cette évolution est exacerbée dans les régions actuelles les plus chaudes, notamment l’arc méditerranéen, le couloir rhodanien et la vallée de la Garonne. Sur ces régions, les vagues de chaleur et journées caniculaires pourront s’étaler sur des périodes supérieures à un ou deux mois en été. (…)

Résumé pour l’évolution des vagues de froid et des journées de gel

Le nombre de jours de vagues de froid ou de gelée est en baisse dans tous les scénarios avec une intensité dépendant fortement du scénario et de l’horizon temporel.

En fin de siècle, le nombre de jours de vagues de froid pourra être divisé par 2 avec un scénario RCP2.6 mais se réduire à 1 jour par an en moyenne en RCP4.5 et RCP8.5. À l’identique, le nombre de journées de gel pourra être divisé par 2 en scénario RCP2.6 tandis qu’en scénario RCP4.5 et RCP8.5, les gelées pourront devenir un événement rare.

Cette diminution est plus forte dans les régions actuellement les plus froides (Est de la France et zones de montagne). (…)

Résumé pour l’évolution des pluies extrêmes

L’indicateur utilisé met en évidence les pluies quotidiennes les plus fortes se produisant en moyenne trois jours par an, de l’ordre de 30 à 60 mm. Il n’est pas forcément représentatif de l’évolution des pluies des épisodes méditerranéens pouvant dépasser souvent 150 mm en un jour.

L’intensité de ces pluies extrêmes augmente légèrement tout au long du siècle sur pratiquement tout le territoire et avec les trois scénarios RCP considérés. Les régions les plus exposées sont celles de la moitié nord, notamment les frontières du Nord et Nord-Est et le littoral de la Manche. L’intensité de la hausse attendue de 3 à 6 mm correspond à une variation de l’ordre de 10 %.

Il est à noter que l’incertitude principale de l’évolution de ce paramètre est plus liée aux modèles climatiques qu’au choix du scénario RCP considéré. (…)

Résumé pour l’évolution des sécheresses météorologiques estivales

Il est rappelé que l’indicateur considéré ne concerne que les sécheresses estivales dues au déficit de précipitation sans prise en compte des effets de l’évaporation sur le sol et autres composantes hydrologiques :

L’évolution attendue de la durée des épisodes des sécheresses météorologiques est fortement dépendant du scénario considéré et de l’horizon temporel considéré. En scénario RCP2.6, la durée de ces épisodes évolue peu, voire diminue. Avec les scénarios RCP4.5 et RCP8.5, ces épisodes augmentent en fin de siècle respectivement de l’ordre de 5 à 10 jours soit une augmentation de 30 à 50 %.

Les régions les plus concernées par ces évolutions sont celles de la moitié sud-ouest du pays, et notamment le pourtour méditerranéen, le bassin aquitain et l’Ouest de la France (Bretagne et Pays de la Loire). (…)

Résumé pour l’évolution des vents forts

Il est rappelé que l’indicateur utilisé cible les valeurs de vent moyen quotidien les plus fortes observées en moyenne 7 jours par an : son évolution n’est pas forcément représentative des valeurs les plus fortes observées lors des tempêtes ou des orages.

L’évolution des vents forts en France présente une grande incertitude liée aux modèles climatiques, plus qu’au scénario RCP ou à l’horizon temporel.

Les régions ayant une plus forte probabilité de renforcement du vent est le quart nord-est, voire la moitié nord. À l’inverse, la probabilité la plus forte de diminution concerne la moitié sud et particulièrement le sud-ouest.

Météo-France

 

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